30/06/2023 - Rue89 - Les stolpersteine s’étendent aux oubliés de l’annexion de l’Alsace

 

Les stolpersteine s’étendent aux oubliés de l’annexion de l’Alsace

Série « Des pavés dans les mémoires » (3/3) Certains groupes de victimes de l’idéologie nazie ou du régime de Vichy ont longtemps été absents des récits mémoriels nationaux ou régionaux. La pose de stolpersteine permet d’inscrire dans l’espace public ces persécutions, tout en rendant hommage à des trajectoires individuelles. 

https://www.rue89strasbourg.com/stolpersteine-oublies-annexion-alsace-267900


 

Avec en particulier ce passage : 

« Si en Allemagne il existe plusieurs pavés (une centaine environ) qui commémorent des personnes déportées [pour motif d'homosexualité], ce n’est pas encore le cas en France. Mais en 2024, Strasbourg installera deux pavés en souvenir d’un couple d’hommes, Josef M. et Eugen E., arrêtés et condamnés pour cette raison.

Cette initiative est née des recherches de Frédéric Stroh, lors de son doctorat en histoire à l’Université de Strasbourg. [...] Parmi ceux qui vont tomber sous le coup du paragraphe 175, Josef M. et Eugen E. Le premier est policier badois, le second un comptable strasbourgeois. Dénoncés, ils sont arrêtés et jugés. Josef M est condamné pour « débauche contre-nature continue » et exécuté en 1942. Eugen E. est condamné à deux ans de prison. Il est emprisonné à Mulhouse puis interné au camp de Schirmeck. 

Le chercheur associé à l’unistra contacte alors Stolpersteine 67, qui avait déjà un objectif en ce sens. Les associations Les OubliéEs de la mémoire et Festigays sont aussi partie prenantes. Les deux pavés seront posés à proximité de la place Kléber. [...]

L’historien a retrouvé la trace de 371 personnes, tous des hommes, arrêtés pour cette raison. Considérée par les nazis comme une partie du Reich, le statut de l’Alsace et de la Moselle diffère du reste de la France. Les hommes y sont soit poursuivis, soit envoyés en France de l’intérieur, soit encore au camp de Schirmeck :

Frédéric Stroh parle des « oubliés de l’annexion », un terme qui fait écho au nom choisi par une association basée à Paris, Les oubliéEs de la mémoire. Ses militants ont œuvré depuis 2003 pour que le souvenir des déportés en raison de leur homosexualité soit associé aux commémorations et travaille à l’installation d’un mémorial national. Cette idée a été portée par Jean Le Bitoux, militant homosexuel très engagé (1961-2010) qui a co-écrit les mémoires de Pierre Seel, alsacien homosexuel arrêté, torturé et interné à Schirmeck. Grâce au travail de l’association, il a été reconnu comme déporté en 1994.

Le domicile de Pierre Seel, déporté alsacien
flanqué du triangle rose à Mulhouse (Photo SW / Rue89 Strasbourg / cc)


[...] 

Frédéric Stroh a tenté de retrouver des parents et des descendants indirects du couple. Du côté de Josef M., exécuté en 1942, ses recherches ont été infructueuses. À sa sortie du camp de Schirmeck, Eugen E. s’est installé dans un village alsacien. Il est mort en 2004 sans avoir raconté son histoire à sa famille. Le jeune historien va prochainement les rencontrer pour leur proposer de les associer à la pose des deux pavés en 2024.

ALLER PLUS LOIN
Sur YouTube : Les combats de Jean le Bitoux, créateur de Gai Pied

Sur Rue89 Strasbourg : tous les articles sur les stolpersteine